Mandeep Mann (à gauche) et Dre. Rachel Harding (à droite).
Le vendredi 14 décembre, une présentation portant sur les cahiers de laboratoires ouverts a été donnée dans l’auditorium De Grandpré de l’Institut Neurologique de Montréal par Dre. Rachel Harding et Mme Mandeep Mann.
Les cahiers de laboratoires sont des outils indispensables pour les chercheurs. Ils leur permettent de noter finement tous les détails pertinents de leurs expériences, incluant leurs hypothèses, leur méthodologie et leurs résultats. Dre. Rachel Harding et Mme Mandeep Mann font partie des chercheurs et chercheuses croyant que ces cahiers devraient être accessibles à tout le monde qui souhaite les consulter. Dre. Harding partage l’entièreté de son cahier de laboratoire sous forme d’un blogue nommé Lab Scribbles (Gribouillis de labo) et dépose ses données sur Zenodo, une plateforme de science ouverte permettant aux scientifiques de partager leurs données. Mme Mann rend aussi ses données disponibles sur Zenodo, mais son cahier de laboratoire se trouve plutôt hébergé sur le site OpenLabNotebooks.org.
Lorsqu’ils publient des articles scientifiques, les chercheurs se doivent de fournir les résultats leur ayant permis de tirer leurs conclusions, mais la description de leur méthodologie est parfois trop superficielle. Selon Dre. Harding, les chercheurs devraient rendre leurs cahiers de laboratoires accessibles aux personnes s’intéressant à leurs études pour qu’elles puissent avoir tous les détails expérimentaux, incluant les résultats négatifs. Une telle pratique est communément appelée “science ouverte”. Dre. Harding explique: “Mon superviseur [Aled Edwards] m’a encouragée à rendre mon cahier de laboratoire ouvert. Comme il était déjà en format numérique, il n’a suffi que de quelques clics pour le partager avec le reste du monde”.
Dre. Harding souligne que beaucoup de chercheurs ont peur de faire le saut vers une pratique ouverte, avant d’exposer les avantages de cette approche. “Les problèmes de reproductibilité et de transparence que l’on voit présentement en neurosciences peuvent être évités en utilisant des cahiers de laboratoires ouverts où l’on écrit chacun des détails de notre projet de recherche et en les publiant en ligne”, avance Dre. Harding. De plus, elle indique que le recours aux cahiers de laboratoires pourrait même aider les scientifiques d’obtenir du financement, contrairement aux croyances populaires. Ce format serait particulièrement endossé par les organismes de charité en raison d’un meilleur retour sur l’investissement et d’opportunités de sensibilisation avec les parties prenantes. Un autre avantage des cahiers de laboratoire ouverts considérable relève du fait que les chercheurs puissent partager leurs résultats et obtenir une rétroaction beaucoup plus rapidement. Il peut s’écouler plusieurs années entre le partage de données par les journaux scientifiques traditionnels, alors que ceci peut être fait en quelques semaines avec un cahier de laboratoire ouvert. Dre. Harding ajoute que ce partage rapide est d’autant plus pertinent pour les chercheurs dont les sujets de recherches portent sur des maladies rares, comme la maladie d’Huntington, qui constitue son champ de recherche. Elle avoue avoir été surprise d’à quel point les scientifiques sont prêts à collaborer: “Il est devenu évident que si tu essaies de construire une communauté où tu partages tout avec n’importe qui sans demander quoi que ce soit, les personnes vont en quelques sortes partager en retour”.
Après la présentation de Dre. Harding, Mandeep Mann a fait une démonstration en temps réel de Zenodo pour illustrer son utilité et ses fonctionnalités. D’abord, il est très facile de relier cette plateforme avec un compte ORCID, un identifiant numérique permettant d’attribuer correctement des résultats de recherche à un chercheur. Concernant les publications, Mme Mann souligne que les auteurs peuvent décider du type de licence sous laquelle ils veulent publier leurs données. Les publications se font automatiquement attitrées un DOI (digital object identifier) pour que les utilisateurs puissent les référencer facilement. De plus, les documents déposés en format PDF peuvent être consultés directement sur Zenodo, ce qui évite d’avoir à télécharger des fichiers de grande taille pour connaître les résultats. Zenodo promouvoit la création de communautés de scientifiques pour permettre un partage de données plus rapide et plus efficace. Par ailleurs, Zenodo montre combien de fois les fichiers ont été consultés, téléchargés ou encore partagés sur des médias sociaux comme Twitter. Mme Mann indique que l’on peut ajouter de nouvelles versions de documents sans trop de difficulté, mais elle met en garde sur le fait qu’une fois en ligne, les fichiers ne peuvent être enlevés du net: “Une fois que c’est mis en ligne, c’est là pour y rester.”
Dre. Harding est une chercheuse postdoctorale au Consortium de Génomique Structurelle (CGS) et à l’Université de Toronto et la coprésidente du comité de communications de la Plateforme canadienne de neuroscience ouverte. Mandeep Mann est étudiante à la maîtrise au CGS et à l’Université de Toronto.
Un article intéressant à propos des cahiers de laboratoire ouverts a récemment été publié par Matthieu Schapira et Rachel Harding en collaboration avec The Open Lab Notebook Consortium. L’article en anglais peut être trouvé ici.